Texte de Charlotte Delbo, Une scène jouée dans la mémoire, 2001

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Corrigé des questions brevet de français 2014

1. « Nous avions choisi, toi et moi » (ligne 21). De quel choix Paul parle-t-il ? 1 point

Réponse

Paul évoque son entrée dans la résistance avec sa femme, Françoise, « nous nous battons pour la liberté » (l. 18) et ce que cela implique à savoir la mort ; « je n’ai pas choisi de te perdre, jamais » (l. 22) ou encore « que tous les combattants ne soient pas au défilé, chacun le sait avant de s’engager. » (l. 18-19)

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2. Françoise partage-t-elle ce choix ? Justifiez votre réponse en vous appuyant sur le texte. 1,5 point

Réponse

Françoise partage les convictions de Paul, c’est-à-dire se battre pour la « liberté » (l. 18). Elle est même prête à mourir avec son mari ; « j’ai toujours pensé que nous tomberions ensemble » (l. 22-23) mais, pour elle, ce n’était qu’une hypothèse comme le souligne la suite de la réplique « si, nous tombions » (l. 23). Toutefois, elle n’avait pas envisagé qu’ils seraient séparés, comme le confirme l’aparté « Et moi je pensais : que m’importe la victoire sans toi » (l. 6)

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3. Comment l’opposition entre les deux personnages apparaît-elle dans leurs répliques ? Vous justifierez votre réponse en vous appuyant précisément sur le texte. 2 points

Réponse

pour retrouver la liberté (« tu verras la victoire », (l. 5) ou « des milliers se lèvent qui nous remplaceront et nous vengeront » (l. 16)). Il est très positif, il n’est pas accablé à l’idée de mourir contrairement à son épouse. Françoise emploie majoritairement des phrases négatives, (« je ne sais pas, je ne voulais pas, je n’avais pas choisi de te perdre… »). Elle exprime sa souffrance, « j’avais mal, que ma douleur qui me serrait devenait insupportable » (l. 3) ici avec le préfixe « in » qui introduit la négation.

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4. Quels sont les arguments de Paul pour convaincre Françoise que leur combat en vaut la peine ? 1,5 point

Réponse

Paul essaie de persuader Françoise qu’elle sera capable d’affronter son absence en évoquant sa force de caractère, « je sais que tu sauras vivre sans moi » (l. 1). Il insiste aussi sur leur but commun, « nous avons lutté de tout notre coeur » (l. 4). Puis, il lui rappelle pour la convaincre que leur combat a pour but d’anéantir, « les armées hitlériennes » (l.13), le nazisme pour faire régner la « liberté » (l. 19). Paul évoque au début puis à la fin la « victoire » (l.6, 26) qui est le résultat d’une lutte notamment des résistants désignés par les pronoms « nous » (l. 15), « les nôtres » (l. 10) ou les groupes nominaux « des milliers » (l. 16), « tous les combattants » (l. 18). Enfin, Françoise ne doit pas oublier que le bien de chacun passe avant leur bonheur personnel. Paul est prêt à mourir car il a accompli son devoir comme il le rappelle à Françoise « ce serait de mourir pour rien, de mourir sans avoir rien fait de sa vie » (l. 20-21). La mort fait partie de leur engagement, « Que tous les combattants ne soient pas au défilé, chacun le sait avant de s’engager. »(l. 18-19). Si elle ne veut pas que sa mort soit inutile, elle doit vivre dans un monde où il aura contribué à la liberté, la paix.

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5. «J’avais toujours pensé que nous tomberions ensemble» (lignes 22-23) 1,5 point a) Quel sens donnez-vous ici au verbe tomber? (0,5 point)

b) Identifiez le temps de ce verbe et justifiez son emploi. (1 point)

Réponse

a. Le sens du verbe tomber dans cette phrase signifie être arrêter et plus particulièrement ici mourir. Expression fréquemment utilisée pour évoquer les soldats morts au combat ; « tomber pour la France ».

b. Le verbe « tomberions » est conjugué au conditionnel présent. Il indique une action qui exprime le futur dans une phrase où la proposition principale est au passé ici le plus que parfait « j’avais pensé ». Eventuellement, on pourrait envisager une éventualité réalisable, un potentiel avec la proposition hypothétique « si nous tombions ».

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6. Selon vous, à qui Françoise s’adresse-t-elle dans les apartés ? 1,5 point

Réponse

Françoise, dans les deux premiers apartés, exprime sa surprise et sa souffrance qu’elle partage avec le public, comme si elle parlait tout haut. Elle s’adresse à elle-même. Ensuite, dans le troisième aparté, elle rétablit la vérité pour le public. Ici, ne veut-elle pas contredire son époux même si elle conscience de son erreur ou mensonge ou est-ce bien après qu’elle a découvert ce fait ?

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7. Une scène jouée dans la mémoire : comment comprenez-vous ce titre à la lumière du texte ? 3 points

Réponse

Tout d’abord, le nom « scène » peut évoquer un court moment de vie qui est longuement développé en référence à la définition du rythme du récit sachant que le dramaturge relate un moment douloureux de sa vie : la perte de son époux. Mais, le substantif « une scène » fait aussi penser au genre théâtral ce que suggère le participe passé épithète « jouée ». Il est question d’une représentation, mais est-ce celle devant un public ou celle qui se joue dans la tête d’une personne qui se remémore des évènements passés. Françoise évoque surtout dans cet extrait la souffrance qu’elle ressent lors de sa dernière entrevue avec son mari, « j’avais mal, que ma douleur qui me serrait devenait insupportable » (l. 3) comme si elle revivait cette scène. Elle reprend les propos de son époux auxquels elle ajoute des commentaires. Donc, nous pouvons en déduire que ce titre fait référence à un moment marquant de la vie d’une personne (autobiographie) où sa vie intime est liée à l’Histoire ; parce qu’elle n’arrive pas à oublier ou/et pour ne pas oublier, cette scène qui s’impose à elle.

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8. Si vous étiez metteur en scène, quels éléments de décor (lieu, éclairages, sons) choisiriez-vous ? Développez votre réponse en justifiant vos propositions. 3 points

Réponse

En tant que metteur en scène, j’installe les deux personnages, dans une cellule de détention assis sur un banc au fond d’une pièce sombre, entourés par d’autres détenus ou ces derniers peuvent seulement suggérés des ombres. J’imagine une petite fenêtre où la lumière blanche filtre entre les barreaux pour évoquer l’optimisme de Paul et sa foi en l’avenir. Donc, l’éclairage blanc provenant de la fenêtre illumine Paul car c’est l’un des personnages principaux mais surtout parce qu’il incarne l’espoir, celui qui croit en ses convictions. Quant à Françoise, il faut créer un effet de clair obscur pour représenter à la fois la jeune femme confrontée à la perte prochaine de son époux mais aussi à celle qui ne veut pas s’effondrer devant son époux/ou celle plus âgée qui ose dire ce qu’elle ressentait vraiment ? Les deux personnages se blottissent l’un contre l’autre donc leurs propos seront énoncés comme s’il s’agissait d’une confidence, sur un ton bas proche du chuchotement pour apporter un aspect plus touchant et accentuer le registre pathétique voire tragique. Effectivement, ce choix contrasterait avec l’attitude digne des deux personnages qui vont face à la mort prochaine pour Paul et l’inéluctable séparation pour Françoise.

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